Haknor, The Artist !


Derrière la signature d’artiste Haknor, on découvre un jeune trentenaire au physique longiligne, à la démarche flegmatique et au sourire timide. Hasiniaina Kominy NORBERT, pour l'état civil, est dessinateur-illustrateur. Il dessine. Tout ce qui l’entoure : les gens, les paysages, les animaux. Sous ses traits de crayon, on voit s’animer des visages ; à chacun de ses coups de pinceaux, on voit prendre vie les zébus et les lémuriens.

Rencontre avec un artiste talentueux et discret, le temps d’une interview.

Fresque 3

En quoi consiste ton travail et comment te définis-tu du point de vue artistique ?

Je pratique l’art graphique, qui consiste à mettre en scène et valoriser une illustration, comme le dessin par exemple, pour répondre à différents besoins : publicité, presse, affiche, livre, humour, ou simplement décoratif et esthétique…

Le dessin m'apporte deux choses : le plaisir de reproduire et de créer ; et celui de me surpasser. Commencer un dessin est un challenge perpétuel, car on ne sait jamais si on le terminera, ni quel en sera le résultat.

Chez moi, dessiner correspond à un besoin vital. Cela me permet d’exprimer et de projeter mes émotions, d'évacuer un stress.

Comment je me définis ? Comme un dessinateur-portraitiste avant tout. J’aime énorménent réaliser des portraits. Parce qu’au-delà du souhait d’immortaliser le modèle, il y a le souci de saisir ses expressions. Quel que soit le modèle : humain ou animal. Et puis, c’est aussi un vrai défi personnel parce qu’on veut que notre dessin soit le plus ressemblant possible au modèle physique ou à la photo.

Je suis également illustrateur : je traduits en image les besoins d’un client qui veut par exemple faire une fresque sur le mur de sa maison, de son restaurant, de sa barque… une banderole publicitaire ou concevoir un logo.

A Morondava, les scènes de vie sakalava ont beaucoup de succès : village de pêcheurs vezo, charrette et zébus, les baobabs, les lémuriens.... Dans les bars, Bob Marley est la star incontestée.

"Je suis un desinateur-portraitiste avant tout"

"Le dessin s'est présenté comme un moyen de m'échapper de mon quartier et de mon quotidien"

A Morondava, tu est une référence. Quand on parle art graphique, c’est d’abord ton nom qui est cité. Comment est né ton intérêt pour le dessin ?

Je devais avoir 6 ou 7 ans quand j’ai découvert l’univers du dessin. Grâce à mon père, qui est photographe, et à travers les comics qu’il nous ramenait chaque semaine de l’Alliance Française. Ensemble, nous passions des heures à parcourir le journal de Spirou, suivre les aventures de Tintin et de Boule et Bill. Toutes ces illustrations aux couleurs vives me fascinaient. Et, très vite, j’ai voulu essayer de les reproduire.

Vous savez, dans le quartier d’Ambalatanga où j’ai grandi, les enfants n'ont pas accès à grand-chose pour s'amuser. Les conditions de vie, du fait de la promiscuité et de l'exiguité des habitations et du manque de salubrité, sont difficiles. C'est un quartier très populaire, surtout connu pour ses activités portuaires, le bruit, les odeurs du séchage de poisson....

Avec le recul, je pense que le dessin était pour moi un moyen de m’évader et de m’échapper de cet environnement.

Et, les comics ont ce pouvoir incroyable de vous entraîner dans des mondes fabuleux, au milieu de personnages et des voyages fantastatiques. En plus, ils vous racontent, avec peu de mots, des histoires extraordinaires. C'est d'ailleurs comme ça que j'ai appris à lire le français.

Comme nous étions adhérents à l'Alliance, je suis devenu fan de BD très rapidement. En même temps que je me prenais de passion pour les séries, je me suis mis à analyser les dessins des personnages, la manière de tracer les traits, la forme des lettres, les angles de vue, le choix des couleurs pour créer une ambiance….. Et puis, j’ai commencé à faire des esquisses et des croquis ;  à dessiner des objets de plus en plus réalistes. J'ai fini par dessiner tout ce qui m’entourait. Je gribouillais partout sur mes cahiers d'école et j'avais toujours un carnet en poche.

Peux-tu nous parler de ton cursus. Es-tu notamment passé par une école d’Arts pour améliorer ta technique ?

J’aurais bien aimé ! J’ai appris en autodidacte ; grâce à l’Alliance Française, dont la bibliothèque très bien fournie, m’a permis de me documenter sur les traités de peinture.

J'y ai découvert Michel Ange et Léonard de Vinci, qui sont mes modèles. Leur travail sur le contraste des ombres et des lumières, le réalisme des objets et modèles sont une constante source d’inspirations et d’enseignements. La Renaissance est ma période favorite.

Comme tout dessinateur, j’ai copié et recopié leurs oeuvres. A la fois pour être fidèle à l’originale mais aussi pour améliorer et perfectionner ma technique. Quand j’étais étudiant à Tana, je proposais aux touristes de réaliser leurs portraits. C’est comme ça que j’ai acquis de l’expérience. Et pour les fresques c’est à la galerie d’arts Les Jocondes que j’ai fait mes armes. Dans le dessin, si on veut progresser, rien ne vaut la pratique.

En 2012, j’ai pu faire ma première expo, toujours grâce à l’Alliance Française qui avait organisé une exposition sur le thème de la Nature.

"Dans le dessin, il y a le plaisir de créer et aussi celui de se surpasser."

Tu nous racontes ta manière de travailler ?

Je dessine principalement au fusain, au crayon, avec de la pierre noire et au pinceau. J’utilise peu l’aquarelle et la gouache, ou le feutre et le stylo car le matériel est coûteux. 

Je travaille sur tout type de support : mur, tissu, bois, bâche. Mais le papier reste mon support de prédilection.

Je travaille également avec des logiciels de dessin. Notamment pour réaliser des logos. De manière à ce qu’ils puissent être facilement exploités par les imprimeurs. C'est une démarche moins solitaire. Le travail avec le commanditaire est plus collaboratif, et les échanges peuvent durer plusieurs semaines. Car, il n'est pas évident de traduire un message, ou saisir un concept avec quelques coups de crayon.

En 2016, j’ai travaillé avec le Conseil municipal de Morondava sur le nouveau logo de la Commune. La Présidente m’a à nouveau sollicité en 2017, pour réfléchir à un visuel pour le projet PALM . En termes de méthodes, je propose toujours quelques déclinaisons, pour ensuite s’arrêter sur une maquette, laquelle sera affinée jusqu'à l'issue du projet. Pour le logo du PALM, le travail a été intéressant car les 4 maquettes ont été soumises au vote du public.

En août 2018, la Présidente du Conseil m’a confié l’illustration d’une stèle commémorative en ciment, dédiée au pilote d'avion Jacques RINGEL, qui se trouve à l’entrée de l’aéroport André RESAMPA.

Il y a quelques jours, j'ai livré une fresque de 6 m de long et 3 m de haut, réalisé sur de la toile de jute et représentant l'allée des baobabs au crépuscule. C’est la plus grande production que j’ai faite, elle m’a demandé une semaine de travail.

Avec ta belle notoriété, arrives-tu à vivre de ton art ?

La demande existe mais pas en volume suffisant pour en vivre correctement ou entretenir une famille. Même quand vous avez une certaine notoriété. J’exerce mon métier de dessinateur-illustrateur en activité accessoire, car c'est ma passion. Mais mon vrai métier est comptable.

Des conseils pour les jeunes qui aimeraient suivre ta voie ?

Si on veut percer dans ce métier, je pense qu'il faut avant tout avoir de la patience et de la persévérance, car un dessin ne se fait pas du premier coup. Il faut sans cesse l’améliorer, le modifier, le recommencer. Encore et encore. Il faut aussi être à l'écoute du client tout en laissant libre cours à son imagination. 

Je pense que ce qui manque à Morondava, si on veut promouvoir la pratique des arts plastiques ou des arts graphiques, c’est un lieu où les jeunes pourraient à la fois découvrir toutes les formes d’arts : peinture, dessin, poterie, pourquoi pas sculpture ; et apprendre les différentes techniques. Cela leur permettrait de développer leurs aptitudes et trouver leur voie. De cette manière, ils pourront aiguiser leurs talents, progresser et se professionnaliser. Un tel lieu favoriserait aussi les échanges, accueillir des expositionst et servir de tremplin aux artistes locaux.

Pour contacter, joindre et suivre l'artiste

Flamant rose

Hasinaina Kominy NORBERT

Ambalatanga - Morondava

Tél : 00 261 (0)32 46 368 17

E.mail : nainahaknor@outlook.fr

Twitter : naina@hhaknor

Instagram : nainahaknor

 
 
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